CHATEAUX
ET
PLACES FORTES DU VAR - 1 " J'atteignais le château fort en ruines. Je saluais le blason et la gloire de ses anciens seigneurs, les grands barons et les comtesses, qui au temps de l'Histoire, maîtrisaient la Provence. " (librement inspiré de Frédéric Mistral) Plus
qu'ailleurs, le phénomène castral en Provence suit un
schéma bien établi depuis l'Antiquité : pillages, brigandages, guerres
de seigneuries, épidémies
de peste, de choléra, famines
... Besoin de protection, un éperon
rocheux ou le sommet d'une colline, une
occupation
primitive, un
hameau, un oppidum, un castrum, un village, un château,
des remparts ... l'apaisement mais de nouveaux dangers, des
remaniements et tout un jeu de migrations entre vallées et remontées
protectrices avant
l'abandon ...180 sites abandonnés ont été
recensés dans le Var et 78 sont encore habités, l'aviez vous remarqué ?
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Tout a commencé avec Rougiers, mais avant de découvrir cette aventure, direction Evenos. |
Les gorges d'Ollioules, Evenos est au sommet à l'extrême droite, on distingue d'ailleurs deux forteresses. |
LES
TROIS FORTERESSES D'EVENOS
Protégeant
l'accès de Toulon par les gorges d'Ollioules, Evenos compte trois
redoutables place fortes séparées par plusieurs siècles mais quelques
centaines de mètres seulement. Lieu stratégique depuis toujours, les
fouilles de l'ancien site de Saint Estève au carrefour de la Reppe et
du Destel révèleront l'emplacement d'une chapelle et probablement d'un
castrum. En 1720, on y installe un poste de garde pour assurer le
contrôle sanitaire de l'épidémie de peste noire. Photo ci-dessous : le
fort de Pipaudon à gauche et la forteresse médiévale au
premier plan.Extrait du bulletin de l'académie du Var, par Louis Bonnaud et Casimir Bottin 1909 : " La dernière station qui nous reste à visiter, celle d'Evenos, est la plus intéressante à tous les points de vue. Géologie, archéologie, histoire, tourisme, tous les attraits s'y trouvent réunis pour l'homme d'étude et l'amateur. La présence à Evenos d'objets provenant de la période néolithique ne laisse aucun doute sur l'existence d'un oppidum dont la nature aurait fait presque tous les frais de défense. La forteresse médiévale, le fort de Pipaudon et le château du Diable. " L'homme des temps préhistoriques a occupé cette hauteur d'où il apercevait le défilé des Gorges et les plaines d'Ollioules s'étendant jusqu'à la mer. Les pierres des murs cyclopéens de cette époque primitive ont servi, quelques milliers d'années plus tard, à l'édification des hautes murailles du donjon féodal encore debout, ainsi qu'à la construction des pauvres maisons du moyen-âge qui sont à ses pieds ; mais les traces de l'oppidum n'ont pas complètement disparu. " |
EVENOS 1 : LE CHATEAU MEDIEVAL |
Le château médiéval d'Evenos domine les gorges d'Ollioules et du Destel depuis le XII siècle. |
Comme le castrum Saint Jean à Rougiers, la forteresse est mentionnée une première fois dans un texte du XIIe siècle, possession successive des vicomtes de Marseille et autres seigneurs de Signes. Redoutable place forte, elle résistera à différentes attaques mais pas à la Renaissance qui la modifie sans y laisser son âme et sa fonction militaire. |
Avant la Révolution, six hommes assurent sa garde avant d'être défaits par les assaillants Républicains en 1793. Occupé une dernière fois pendant la seconde guerre mondiale, le château est ensuite abandonné et vandalisé. Mais ... |
La grande cour du château se termine par une tour ronde dite « Tour Blanche ». |
L'ensemble plonge ensuite vers le carrefour des gorges du Destel et de la Reppe. |
Les observateurs n'auront pas manqué la présence de
roches noires basaltiques qui entourent le site et ont servi à la
construction du château (sauf la tour Blanche), elles sont les témoins
géologiques d'un passé volcanique très tourmenté. Extrait des ANNALES DE LA SOCIÉTÉ D'HISTOIRE NATURELLE DE TOULON, 1933 - " Les roches volcaniques de la région toulonnaise par H. PARENT : " Les roches volcaniques des environs de Toulon, si elles sont nombreuses et variées, couvrent des surfaces de peu d'étendue et par suite ont peu d'influence sur le relief du pays ; au point de vue morphologique leur rôle est tout à fait subordonné. Cependant, il est intéressant de bien connaître l'allure, l'âge et la position de leurs gisements. " |
" On confond fréquemment l'âge des différentes venues
éruptives de la
région; en outre, on considère souvent à tort comme provenant de
bouches volcaniques distinctes des lambeaux d'une même coulée, lambeaux
isolés par l'érosion en buttes, en plateaux, séparés parfois par de
grands intervalles, donnant aisément l'illusion de volcans distincts. Les points d'émission, les cheminées volcaniques, sont d'ailleurs très rares dans la région toulonnaise ; c'est ainsi qu'il faut supprimer les expressions de : volcan d'Evenos, culot volcanique de la Garde, appellations anciennes que l'on rencontre dans des ouvrages de vulgarisation et dans des articles de certaines revues scientifiques. Ce sont en réalité des témoins de grandes coulées épargnés de la dénudation. " |
Le donjon est de forme pentagonale, il abrite une chapelle dédiée à Saint-Pierre. |
En mai 2012, Var Matin titre "Le monument médiéval, en ruines, a été racheté par un particulier qui veut lancer d’importants travaux de réhabilitation pour en faire sa demeure. " En effet, en 2011 la famille Daniel a vendu le château à Cédric Velasco pour dit-on 90 000 euros. Le journal précise que "le château n'est pas classé", alors que "le village d'Evenos l'est. " |
Et demain ? ... |
Extrait de LES PEINTRES FRANÇAIS - SALON DE 1859, par Louis Jourdan commentant un tableau de Courdouan : " Sa Vue d'Evenos, prise au milieu des gorges d'Ollioules, gigantesque débauche de roches volcaniques, ne peut donner qu'une idée incomplète des ces magnifiques horreurs que les voyageurs allant de Marseille à Toulon ne pourront plus admirer, grâce au chemin de fer qui a sagement évité ces grandes masses montagneuses dont la capricieuse distribution aurait défié les efforts du génie humain. M. Courdouan n'a pas craint de se mesurer avec ces géants de granit, et il a parfaitement rendu leurs aspects fantastiques et bizarres, leur caractère grandiose. Quelle science du dessin dans ce tableau ! Quelles lointaines et lumineuses perspectives ! Je recommande aux jeunes artistes cette toile, une des plus remarquables qui soient au Salon. " |
EVENOS
2 : LE FORT
PIPAUDON.
" La protection du port de Toulon face à
l'évolution des armements, le relèvement de la défense de nos
frontières aux lendemains de la guerre de 1870, devaient conduire à la
mise en place de nouvelles fortifications connues sous le nom de "Sérée
de Rivière". À Toulon, la construction de ces nouvelles enceintes
débute à partir de 1873. Un nouveau rideau fortifié se substitue à
celui édifié autour des années 1840 sur le Faron. Partant du fort de
Six-Fours, il s'étire sur une ligne de 35 km jusqu'à la Colle Noire en
passant par le Gros-Cerveau, le mont Caume et le Coudon. Le fort de
Pipaudon en constitue la touche finale. Placé aux avant-postes, à la
sortie des gorges d'Ollioules, il contrôle la plaine du Beausset et le
glacis du mont Caume." (magasine Cols Bleus, éd du 06/01/2001). |
Le "jeune" fort de Pipaudon fait face à l'ancienne forteresse d'Evenos. |
Si l'image précédente ne vous a pas convaincu du caractère de forteresse, celle-ci replace le fort au sommet de sa colline à 406 m. d'altitude. |
" Pipaudon
s'inscrit dans ce vaste ensemble des forts protégeant Toulon
(fortifications du système Séré de Rivières). Après de premiers
aménagements visant à l'installation d'une batterie mobile, la valeur
militaire du site devait conduire à son occupation permanente. Le
projet, approuvé en 1892, est mis à exécution entre 1893 et 1895.
L'ouvrage adopte un profil furtif, ses dispositions architecturales
répondent à l'ultime évolution de l'art de la fortification. Les locaux sensibles sont creusés dans le roc, la partie supérieure de l'ouvrage est affectée à l'artillerie. Le fort reçoit un armement théorique de 6 canons de 120 mm, 6 canons de 95 mm et 2 mortiers de 15 mm servis par 250 fantassins et 110 artilleurs. Le coût de sa construction s'élève à 376 000 francs-or. " (magasine Cols Bleus, éd du 06/01/2001). |
Comme
ses homologues le fort possède tous les moyens nécessaire à la mise en
œuvre d'un
armement lourd : magasins, poudrerie, monte-charge, citerne, locaux-vie
... Le 21 août 1944, le 3ème RSAR Régiment de Spahis Algériens de Reconnaissance) et des éléments du 7ème RCA (Régiment de Chasseurs Algériens) en route vers Toulon libèrent Sainte-Anne d’Evenos. Les Allemands ayant miné les gorges d'Ollioules ils empruntent la route d'Evenos où les soldats du chef d’escadrons Mauche neutralisent le fort de Pipaudon. La place est libérée, on y installe alors des canons américains de défense antiaérienne. |
Le 05 décembre 2000, " le contre-amiral Claude Marcus,
adjoint territorial du Commandant en chef pour la Méditerranée, a remis
les clefs du fort de Pipaudon à M. Di Cristofaro, maire de la commune
d'Evenos. La cérémonie s'est déroulée en présence de de nombreux élus
représentant les communes voisines et le conseil général. La
municipalité d'Evenos avait fait connaître à la Marine son intention de
se porter acquéreur de l'ouvrage situé sur sa commune. Mais, jusqu'à ce
jour, la préfecture maritime n'avait pu accéder à sa demande, une
partie du fort étant occupée par des stocks militaires du commissariat
de la Marine. " (magasine Cols Bleus, éd du
06/01/2001). Le
fort est depuis utilisé par les services municipaux et pour des
activités culturelles. |
EVENOS 3 : LE CHÂTEAU DU DIABLE
" Le Jardin du Destel. « Promenons-nous dans le
bois »,
puisque nous sommes en promenade, ... dans le bois de pins d'Alep que
pressent les falaises des Gorges d'Ollioules au confluent de la Reppe
et du Destel, entre rocher de St-Estève et rocher du Château du Diable.
Remontons le lit de roche et de galets dans lequel se perdent les eaux
de ce torrent. 350 jours de l'an, l'excursion se fait à pied sec. "
(Bulletin de l'Académie du Var - Jean Layet - 1952). |
Le château du
Diable. Le
Diable habita un temps cette forteresse pétrifiée située à l'ouvert des
gorges du Destel
jusqu'à ce que Saint Martin l'en déloge à coup de légende. Les mêmes
curieux seront sûrement passés par les grottes éponymes, empreintes
laissées par le sauveur d'Evenos alors qu'il escaladait la falaise pour
rejoindre le village. Extrait du Bulletin de l'Académie du Var séant à Toulon - 1954 - par Jean Layet : " Je crois devoir rappeler à la suite de cette tradition une légende qui pourrait se rattacher à l'une ou l'autre de ces Christianisations. C'est celle de St-Martin dont le nom se retrouve pour ainsi dire à chacun des pas que l'on fait dans le Destel. On y rencontre une source, une cascade, une empreinte gigantesque de pied creusée par la nature à la surface d'un rocher, toutes sont de St-Martin. Un groupe de grands rochers qui ressemble, vu du fond du ravin, à quelque forteresse du Moyen Age a été appelé Château de Diable, en souvenir du Saint légendaire qui poursuivait Satan dans ses repaires. St-Martin, évêque de Tours au IVe siècle n'est jamais venu dans notre région, mais sa renommée s'est étendue dans la France entière. Il est le Patron d'Evenos, vieux village qui domine les falaises du Destel, et sa légende a trouvé dans ce lieu solitaire un terrain éminemment favorable puisque jusqu'à nous elle s'y est maintenue. Peut-être serait-il intéressant de compulser sa vie afin de savoir si, ayant pratiqué des Christianisations en son diocèse, il aurait indirectement donné à cette tradition toulonnaise une base véridique. " |
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