Le Château de Montauban à Ollioules - Bonaparte, capitaine
en septembre, général en décembre.
« Du village d'Ollioules, deux hauteurs, entre
lesquelles passe aujourd'hui la grande route de Toulon, masquent la
ville et la rade. Au pied du mamelon de droite, sur le versant sud, se
trouve un des plus jolis, un des plus curieux châteaux de la région.
Peu de gens soupçonnent son existence, abrité des regards, dissimulé
qu'il est par un repli du terrain."C'est la vieille demeure de Montauban, qui date de 1622, comme l'indique un chiffre gravé sur la façade. Elle a la noblesse robuste et sobre des constructions provençales : deux tourelles d'angle, encadrant une façade simple, qui vaut par l'harmonie des proportions, l'exceptionnelle beauté du site, une vaste terrasse ombragée, à laquelle aboutissent des escaliers bien dessinés. Ce fut, sous l'ancien régime, une des résidences des évêques de Toulon. L'un d'eux, Mgr de Montauban, dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, lui donna son nom. » (Bonaparte à Toulon. L'aurore de Napoléon, Raymond Recouly - 1929). |
Comme pour le château Peiresc à Belgentier, ce château privé est exceptionnellement ouvert pour les journées européennes du patrimoine - sur inscription - il convient donc de remercier chaleureusement les propriétaires mais aussi P-M. G., guide de notre visite, la garde impériale et tous ceux qui ont contribué au succès de cette visite. |
" Le 17 septembre 1793 près de cette
bastide de Montauban le capitaine Bonaparte chargé de l'artillerie du
siège de Toulon fit les premiers essais de tir au canon contre
l'escadre anglo-espagnole en présence du général Carteaux. Ce fut
l'aurore de Napoléon. Le souvenir napoléonien, 18 décembre 1993." |
La vue sur la rade de Toulon. Profitons-en pour remonter un peu plus le temps avec cette autre vue de Toulon en 1756 ... |
Intitulée
: "
Deuxième
vue de Toulon : vue de la ville et de la rade " - 1755-1756
Huile sur toile
peinte en 1755-1756 par Joseph Vernet
- dimension : 165 X 263 cm - Musée du Louvre. Une copie, œuvre de
Daniel Collemine
est exposée au musée de la Marine à Toulon depuis 1988. |
" Deuxième
vue de Toulon : vue de la ville et de la rade " - Huile sur toile
peinte en 1755-1756 par Joseph Vernet
- dimension : 165 X 263 cm - Musée du Louvre. Une copie, œuvre de
Daniel Collemine
est exposée au musée de la Marine à Toulon depuis 1988. " Cette vue est prise d'une maison de campagne à mi-côte de la montagne derrière la ville. On y a représenté les amusements (ndlr : dont la pétanque - en bas à droite !) des habitants et les voitures dont ils se servent pour aller aux maisons de campagne, qu'on nomme bastides. L'heure du jour est le matin" (Joseph Vernet - 1757). Une commande royale. " C'est en 1753 qu'appelé à Paris par M. le marquis de Marigny (ordonnateur général des bâtiments du roi), que Joseph Vernet reçut l'importante et délicate mission, à laquelle la marquise de Pompadour, alors toute-puissante dans l'esprit de Louis XV, n'était certainement pas étrangère, de reproduire de son pinceau les principaux ports du royaume, collection unique, véritable monument dans l'histoire de l'art au XVIIIe siècle. " (Académie du Var). Claude Joseph Vernet, Peintre du Roi, Conseiller de
l'Académie royale de peinture et de sculpture - 1781.
|
Il lui a fallu dix ans pour réaliser
quinze tableaux, représentant les ports de Marseille (2 vues 1754),
Bandol (1 vue 1754), Toulon (3 vues 1755-1756), Antibes (1 vue 1756),
Sète (1 vue 1756-1757), Bordeaux (2 vues 1578-1759), Bayonne (2 vues
1760-1761), La Rochelle (1 vue 1762), Rochefort (1 vue 1762) et Dieppe
(1 vue 1765). "Riches de détails anecdotiques et architecturaux,
véritables témoins d'une époque. Cette série des Ports de France est
l'un des fleurons du patrimoine maritime français."
(musee-marine.fr). Ce tableau " a suscité bien des questions, des suppositions. Historiens, archivistes, curieux ont essayé d'y répondre. A Toulon où se situait exactement cette superbe bastide ? A qui appartenait-elle ? Quand et pour qui avait-elle été édifiée ? Quel pouvait être le sculpteur qui avait réalisé la fontaine ? Le blason qui le surmonte pouvait-il aider à identifier la famille possédant ou ayant possédé cette propriété et apporter ainsi quelques éclaircissements pouvant faciliter les recherches? Encore plus étonnant sinon étrange, cette bastide ne figure sur aucun plan cadastral et aucun mémoire de l'époque. Bien qu'il reste encore des archives qui n'ont pas délivré tous leurs secrets, la conclusion des recherches menées jusqu'à ce jour — recherches conduites avec minutie et méthode — tend à démontrer ou à confirmer que Joseph Vernet a tout simplement imaginé cette propriété. Pour quelles raisons ? C'est une autre histoire... " (Cols Bleus - 1987) Daniel Collemine reproduisant le tableau de Vernet (Cols Bleus - 1987). |
Quelques années plus tard, en 2000
" Ce
tableau a en effet suscité une vive discussion (à laquelle je me suis
trouvé personnellement mêlé, ce qui explique peut-être l'intérêt que je
lui porte), discussion pour savoir où avait été peint ce tableau et
quels personnages y avaient été représentés. J'avoue que mes recherches sans doute menées trop mollement n'avaient eu aucun résultat satisfaisant, au contraire, l'étude que vous avez faite aboutit après une lumineuse démonstration à une conclusion indiscutable la maison représentée serait la maison de campagne des Jésuites - qui, vous le savez, assuraient la formation des aumôniers des bâtiments de la flotte - propriété située sur les pentes inférieures du Faron et appartenant actuellement au commandant Scias, propriété que les Jésuites ont mise à la disposition de l'Intendant du Port, le sieur Le Vasseur de la Villeblanche, pour y organiser une réception champêtre. La qualité de votre communication est telle, qu'elle a fait l'objet d'un tiré-à-part par l'intermédiaire de l'association des amis du Vieux-Toulon. Je ne saurais trop conseiller à mon auditoire de se la procurer. C'est un modèle d'étude historique. " (M. Saint Stéban - Académie du Var - 2000). |
" 28 août 1793 -
Introduction
des Anglais dans le port de Toulon " (Auteur : A. Féraud) |
LES RAISONS. 4
ans après 1789, le
Révolution essaime
toujours. Juin 1793, les Montagnards provoquent l'arrestation de 32
députés et 2 ministres Girondins entrainant une série d'insurrections
dans plusieurs grandes villes, dont Toulon où les Royalistes qui
viennent de supplanter les Jacobins sont encore très présents - ne
surnomme-t-on pas la marine, la Royale ! Fin août, la situation est tendue, les Royalistes toulonnais réussissent à convaincre une coalition emmenée par les Anglais, les Espagnols mais aussi des troupes napolitaine et sarde de débarquer à Toulon où ils entrent fin août. Les troupes de la Convention se mettent alors en marche arrivant par Marseille avec le général Carteaux et par l'est avec l'Armée d'Italie avec à sa tête le général de La Poype. |
Proclamation de
l'amiral Hood (ci-contre) qui propose le 23 août 1793 :
"Expliquez-vous, et je vole à votre secours pour briser les chaînes qui
vous accablent, et pour être l'instrument d'un bonheur durable, qui
succédera aux quatre années de misère et d'anarchie, dont votre
infortuné pays a été la victime. " Le comité général des sections de Toulon lui répond le lendemain : " ... après avoir fait lecture de la proclamation de l'amiral Hood, commandant en chef l'escadre de S. M. Britannique, ainsi que de sa déclaration préliminaire d'après son conseil de guerre, et après avoir communiqué ces deux pièces au premier comité de sûreté générale et à tous les citoyens de cette ville réunis en sections ... Déclare à l'amiral Hood : ... Que le vœu unanime de tous les habitants de Toulon est de rejeter une constitution qui ne peut pas faire son bonheur, et d'adopter le gouvernement monarchique, tel qu'il avoit été organisé par l'assemblée constituante de 1789 ; et, en conséquence, ils ont proclamé leur légitime Roi Louis XVII, fils de Louis XVI, et ont juré de le reconnoître toujours pour tel, et de ne plus souffrir le despotisme des tyrans qui gouvernent aujourd'hui la France ; ... Que le pavillon blanc sera arboré au moment que l'escadre anglaise aura mouillé dans la rade de Toulon ; ... C'est d'après cette déclaration, si elle est approuvée par l'amiral Hood, que les Toulonnais se regarderont comme unis de cœur et d'esprit aux Anglais et aux autres puissances coalisées, et qu'avec leur secours ils verront renaître enfin cette paix après laquelle ils soupirent depuis si long-temps. A Toulon, le 24 août 1793." |
Le général Carteaux "offre un spectacle de haut goût" à Bonaparte au château de Montauban. |
Remarquez la date "1622" sur la façade. |
Et voilà une excellente idée. Quelques morceaux impériaux
ont accompagné une visite par ailleurs remarquablement commentée. Un
détail doit vous interpeller ! |
Un pas de tir. La terrasse de Montauban est, pour
l'état-major de Carteaux, un poste de commandement confortable et tout
indiqué. Carteaux, général « sans culotte», comme l'appelait Hoche, n'avait, bien qu'il commandât en chef, que des notions très vagues sur le tir de l'artillerie. Où donc, au demeurant, les aurait-il puisées ? Ancien enfant de troupe, soldat, peintre une fois son service terminé, c'est surtout la journée du 10 août, où il se bat du côté des émeutiers, qui décide de sa brillante carrière. Quelques succès faciles remportés sur les fédéralistes, à Lyon, puis en Avignon, lui permettent de franchir coup sur coup tous les grades, de passer de colonel général en chef. Ses talents n'ont pas suivi cette rapide progression. Fier de sa personne, avantageux, beau parleur et quelque peu débraillé, ce qui paraît de bon ton à cette époque, il n'a à la bouche que les mots d'assaut, de baïonnette ; il ne songe qu'à enlever Toulon de vive force, sans prendre garde que c'est un dur morceau, sur lequel ses dents risquent de se casser. Accompagné de sa femme, vigoureuse et forte gaillarde qui ne le quitte pas d'une semelle, lorsqu'il transfère son quartier général du Beausset à Ollioules, il ordonne, par réquisition, qu'on emporte avec lui son lit, craignant qu'il ne soit difficile de trouver ailleurs une couche assez vaste, assez résistante pour un ménage de cette corpulence. (Ndlr Bonaparte et Mme Carteaux auraient été très complices, comprenne qui voudra). Peu après l'arrivée de Bonaparte, le 13 septembre, désireux de lui offrir un spectacle de haut goût, Carteaux conduit le jeune artilleur à une batterie qu'il a fait établir pour brûler, assure-t-il, l'escadre anglaise. Or, elle est située à une grande lieue du but, c'est-à-dire à une distance double ou triple de la portée de ses canons. « Les grenadiers, écrit plus tard Napoléon, disséminés dans les batteries voisines, étaient occupés à chauffer les boulets avec des soufflets de cuisine. Il est difficile d'imaginer rien de plus ridicule. » (Bonaparte à Toulon. L'aurore de Napoléon / Raymond Recouly - 1929). " Carteaux, Général de Division, Né à Versailles Dépt de
Seine et Oise le 1er janvier 1751 " (auteur Bonneville).
|
Un autre pas de tir. " Marmont, d'après des témoignages
directs, agrémente de quelques détails piquants le récit de cette scène
qui, d'après le commandant Nel, se serait passée sur la terrasse de
Montauban. A la fin d'un dîner, où le général en chef a convié
Bonaparte, échauffé par les mets et les vins, il songe à lui montrer
comment des boulets républicains vont incendier les vaisseaux
royalistes. Ces boulets, malheureusement, n'arrivent pas à moitié
chemin. A peine a-t-on tiré les premiers coups qu'on est bien obligé de
le constater... La terrasse de Montauban est un admirable observatoire, mais elle est, pour les batteries, un emplacement détestable. Elle permet de voir les vaisseaux anglais, non de les atteindre. C'est à les atteindre que songe avant tout Bonaparte quand il rentre, le soir venu, au quartier général, avec son chef incapable et déconfit. Ce qu'il veut, et ce qu'il faut, c'est, sans une minute de répit, se rapprocher de la rade, afin de tirer à boulets rouges sur cette flotte qui craint comme le diable les boulets incendiaires. Tout le secret du siège est là. " (L'aurore de Napoléon / Raymond Recouly - 1929). Le général Carteaux sera finalement limogé début novembre avant que Dugommier ne finisse par commander les troupes républicaines. Napoléon au siège de Toulon - 30 novembre 1793
|
Cet aménagement situé sur un point haut derrière le château a toute son importance, c'est en effet à cet endroit que les troupes loyalistes hissaient leur drapeau et ainsi signaler leur présence sur les hauteurs de la rade. |
Canon de 18 livres du système
Gribeauval
pesant 3800 Kg. A l'époque ce modèle armaient les troupes
républicaines, comme en témoigne la devise républicaine "Liberté -
Egalité " qui
y figure (le mot "fraternité" sera rajouté à la devise en 1848). |
" L'histoire du siège, pendant les treize semaines qu'il
dure, consiste en une suite de bonds en avant, soigneusement préparés
par l'artillerie, exécutés par l'infanterie, dans la direction de
l'objectif principal, les hauteurs du Caire, dominant la rade, jusqu'à
l'épisode final, l'enlèvement du mamelon le « Petit Gibraltar », (ndlr : le fort Balaguier) qui
précipite le dénouement. " |
" Le 11 décembre,
un nouveau conseil de guerre se tient à Ollioules, où se scellent les
destinées de Toulon. La décision est prise d'exécuter, avec toutes les
forces disponibles, une attaque principale sur la hauteur du Caire, une
autre, moins importante, sur la montagne du Faron. Que la première des
deux réussisse, et, la rade de Toulon devenant intenable aux vaisseaux
des alliés, ceux-ci seront obligés de l'évacuer. ... " |
" Ici, l'énergie, l'activité de Bonaparte trouvent leur
récompense. Les batteries qu'il a montées et mises en place font
merveille. Celle des Jacobins, des Hommes sans peur, des Chasse
Coquins, croisent et concentrent leurs feux, tirant sans répit sur les
positions ennemies, durant les trois journées qui précèdent : les 14,
15 et 16 décembre. Entre temps, toutes les autres positions du front
sont soumises à un violent bombardement, de manière à tenir partout sur
le qui-vive les assiégés, à leur cacher le point où se produira
l'attaque principale." |
La chapelle de
Faveyrolles à Ollioules - la capture du général anglais O'Hara.
Cette chapelle fut construite vers 1870 en
remplacement d'une autre, dédiée à Notre-Dame de Liesse, datant du
XVIIe siècle. Mais ce qui nous intéresse ici est inscrit sur la plaque
du mur latéral : " Le 30 novembre 1793, à quelques pas, au nord-est de
cet emplacement, Bonaparte repousse une sortie de l'ennemi venant de
Malbousquet et fait prisonnier le général anglais O'Hara (Le souvenir
napoléonien, 25 novembre 2001). " |
" Le grand Napoléon des petits enfants -
1893 - Jules de Marthold. Au siège de Toulon chargeant un canon comme
un simple soldat, il attrape la gale noire. " " Le général O'Hara monta avec soin une attaque, qui devait se faire avec des effectifs anglais, napolitains, espagnols, sardes, français, soit 2 300 hommes en tout. Les troupes se massent pendant la nuit, dans Malbousquet. Le 30 novembre, avant le jour, à quatre heures du matin, elles attaquent les positions ennemies ... " Dugommier, Bonaparte, Salicetti accourent en toute hâte sur le lieu du combat. Ils rallient vigoureusement leurs hommes, organisent sans retard une contre-attaque. Les assiègés, dispersés, sans cohésion, ne tiennent pas. De la batterie de la Convention, O'Hara, voyant leur déroute, se jette au milieu des combattants. Atteint d'un coup de fusil, incapable de fuir, il est fait prisonnier par les Républicains, qui essaient de profiter de leur avantage, de s'emparer de Malbousquet. Mais les canonniers anglais tirent sur eux à mitraille et repoussent facilement leur attaque. " Lieutenant Général O'Hara, Gouverneur de Toulon. Blessé à un bras sur les hauteur des Arènes près de Toulon le 30 novembre 1793. Perdant son sang et affaibli, il est obligé de s'assoir sur un mur où il demande à ses hommes de le laisser là et leur ordonne de se sauver, c'est ainsi que les Français vont le faire prisonnier. " (Impression Bowles & Carver - collection British museum). |
Dugommier, au plus fort de la mêlée, avait reçu deux légères
blessures.
Bonaparte s'était battu, lui aussi, au milieu des fantassins. Se
glissant à la tête d'un bataillon, le long d'un boyau couvert qui
rejoignait une des batteries, il arriva, sans être aperçu, tout près
des ennemis, ouvrit à bout portant le feu, provoquant parmi eux une
terrible confusion. Il fut promu colonel à la suite de cette affaire. |
La chapelle
Notre-Dame d'Espérance et prieuré des Oratoriens, témoin contemporain
des combats de 1793.
Cette chapelles fut achevée vers le milieu du
XVIe siècle dans un style gothique provençal. Au début du XVIIe siècle,
elle fut cédée aux Pères Oratoriens de Toulon qui y établirent un petit
prieuré et la firent orner de gypseries.Elle fut, en 1793, le théâtre de violents combats entre les troupes républicaines venues de Toulon et les Anglais qui avaient établi une batterie à proximité. Incendiée, elle ne fut jamais relevée. La commune qui en est propriétaire, a fait cristalliser les vestiges. |
"
Reprise de la ville de Toulon par les armées de la République contre
les Anglais et les Espagnols " A Paris chez le citoyen Md. d'Estampes, rue saint Jean de Beauvais - N°4 - auteur : Narcisse Díaz La Peigna |
Tout laisse à penser que notre peintre de l'Ecole de
Barbizon n'a jamais vu Toulon ! |
Un
héritage
particulièrement insolite et cocasse, la "maisson au boulet" à Toulon
_______ Au 89 cours Lafayette à Toulon, un boulet est encastré dans la façade au niveau du deuxième étage. On retient (et on aime retenir) l'hypothèse d'un boulet - anglais - tiré en 1793 et ayant effectivement atteint cette maison, peut-être sans blesser personne - encastré par la suite par un propriétaire et citoyen républicain voulant témoigner de son patriotisme et de sa résilience. Comme l'oratoire manquant de la Ste Baume ou la dispersion des statues du mausolée de Valbelle, internet oublie ici de nous donner la phrase gravée sur le boulet ! Frustrant... Alors la voici : " 28 FRIMAIRE AN 2 REP - FUITE DES ANGLAIS - TREMBLE - PASSANT C'EST UN PRESENT DES ENNEMIS ". Décryptage. Le 28 Frimaire de l'an 2 de la République correspond au 18 décembre 1793 de notre calendrier, c'est précisément la date de la "Fuite" des Anglais de Toulon comme vous pourrez le lire plus bas. |
Ou encore ... Siège de Toulon par les républicains sous le
commandement de Dugommier. D'après une gouache de Mugnai, 1793. (Photo
Musée de la Marine - Cols Bleus 1995) |
" Fuite et embarquement précipité des Anglais lors de la prise de Toulon par l'armée républicaine " |
Cette estampe est également annotée : " Les traitres
toulonnais et les féroces Anglais par la bravoure des troupes de la
République, viennent d'être défaits dans leurs retranchements, forcées
de leur s redoutes, poussées la baïonnette dans les reins abandonnant
leurs bagages et leurs trésors, indignes de la honte, n'évitant que le
supplice, entassés sur des vaisseaux mal appareillés à demis incendiés,
gouvernés par la terreur battus de la tempête, ils vont recevoir de la
nature qu'ils ont outragé le juste châtiment réservés à leurs crimes. Cet évènement heureux qui est un prodige à citer dans l'Histoire, est le précieux résultat de l'accord du Génie, de la bravoure et de l'impétuosité d'un Peuple qui combat pour la liberté ; ayant dans cette rencontre l'intempérie de la saison, et la rage des tyrans à combattre, il naquit l'un et l'autre. Il avait à sa tête les Représentants du Peuple Robespierre, Salicetti Ricord et Fréron, L(D)ugom(m)ier commandait à l'ouest et Lapoye à l'Est. Cette victoire éclatante eu lieu le 27 Frimaire l'an 2ème de la République française une et indivisible ; elle fut le signal de nouveaux triomphes pour les Armées de la République, les lignes de Weissembourg sont reprises, Landau est délivré ; l'Autrichiens et le Prussiens furent partout assaillis, la Patrie est sauvée, vive la République. Se vend à Paris chez la citoyenne Partout Cloître S. Benoit n° 349 Sn de Beaurepaire. " |
Evacuation des Puissances coalisées du port de
Toulon - 18 décembre 1793
" L'évacuation commence immédiatement ; elle s'accompagne, ce qui est fatal, de beaucoup de précipitation et de désordre. Il semble, d'après les récits des témoins, que la population ne crut pas, tout d'abord, à un abandon aussi rapide. Les événements s'étaient déroulés d'une façon si imprévue, si soudaine, que parmi les civils beaucoup se trouvèrent pris au dépourvu. Les mauvaises nouvelles, cependant, tout d'abord assez vagues, ne tardent pas à se préciser. Les troupes alliées font leurs préparatifs d'embarquement, difficiles, sinon impossibles à dissimuler. Alors, tout d'un coup, la terreur, l'affolement s'emparent des malheureux habitants. Tous ceux — et ils sont nombreux — qui se sentent menacés, veulent partir, et tout le monde veut partir à la fois. Les embarcations particulières, barques de pêche,canots, « bettes », « pointus », tartanes, sont en assez petit nombre. ... Bientôt, c'est la panique. Les rues sont pleines d'habitants effrayés. Les quais du port se couvrent de malles, de paquets, de matelas, de caisses, de couvertures. Tout le monde veut se sauver à la fois. " |
« En
pleine nuit, écrivait plus tard Napoléon, l'horizon à plusieurs lieues
était tout en feu. Il faisait clair comme le jour ; le spectacle était sublime, mais déchirant. » |
Incendie de
l'arsenal de Toulon - Musée de la Marine.
" A l'instigation des Anglais, il avait été résolu d'incendier ceux des bateaux français qui ne pouvaient pas être emmenés, ainsi que les arsenaux et les magasins. Un officier britannique intrépide et aventureux, sorte d'enfant perdu, le capitaine Sydney Smith, fut chargé de cette mission. ... Sydney Smith, avec une poignée d'hommes, allume un peu partout, dans les magasins, les hangars, sur les bateaux, un gigantesque incendie. Les Espagnols, qui devaient le seconder, au lieu de couler deux frégates chargées de munitions, y mettent le feu, ce qui provoque une terrible explosion. Tout flambe à la fois. Les grands vaisseaux de haut bord, avec leurs énormeslcarènes, leur haute mâture, brûlent comme des torches. De tous côtés, des flammes, des détonations, des clameurs et des gémissements. |
Incendie de
plusieurs vaisseaux français
lors de l'évacuation des Anglais à la fin du siège de Toulon, décembre
1793.
Heureusement, le temps manquait aux incendiaires pour achever l'oeuvre si bien commencée. Les forçats du bagne, dont beaucoup avaient rompu leurs chaînes, s'employèrent de leur mieux à éteindre le feu. Une partie des navires, des magasins, des entrepôts, purent ainsi être sauvés. Cet incendie souleva, dès qu'il fut connu, les plus vives colères, les protestations les plus véhémentes contre l'Angleterre. C'est un signe des temps. Depuis lors, à vrai dire, nous en avons vu bien d'autres. " Raymond Recouly, encore et déjà en 1929 ! |
Siège de Toulon
par Jean Antoine Siméon FORT (musée national
des châteaux de Versailles et de Trianon).
" La reddition de Toulon aux Anglais avait été ressentie par la France révolutionnaire comme une insulte, un outrage. C'était pour le pays une flétrissure, une tache qu'il fallait laver au plus tôt dans le sang. La réaction contre cet acte de félonie fut immédiate et profonde. Toulon repris, cette heureuse nouvelle provoque un débordement d'enthousiasme. On la regarde comme une victoire nationale, retentissante, qui est aussitôt célébrée de mille manières, en prose comme en vers. Elle inspire un nombre considérable de pièces, représentées un peu partout. Dès qu'elle en est informée, le 24 décembre, la Convention décrète que l'armée républicaine dirigée contre Toulon a « bien mérité de la patrie ». Il sera célébré dans toute l'étendue de la République une fête nationale, le premier décadi qui suivra, dans chaque commune, la publication de ce décret. La Convention tout entière assistera à cette cérémonie. Mais après les récompenses, les châtiments, qui, pour un crime de cet ordre, ne seront jamais assez sévères. Le nom de Toulon doit être supprimé et remplacé par celui de Port-la-Montagne. Les maisons de la ville seront rasées. Seuls, seront conservés les établissements indispensables aux services de la guerre et de la marine. Des punitions aussi terribles mesurent la colère qui les inspira. Elles expliquent la sévérité de la répression. Les sanctions englobèrent pêle-mêle, comme il arrive, les innocents et les coupables. ... Quelle fut l'étendue des massacres, car on ne peut guère appeler d'un autre nom ces exécutions collectives, d'où toute justice est à peu près exclue ? C'est ce qu'il est assez difficile de préciser. " (Bonaparte à Toulon. L'aurore de Napoléon / Raymond Recouly - 1929). |
" Arrivé
capitaine trois mois
avant, Bonaparte est nommé général de brigade, aussitôt après la prise
de Toulon, bien qu'il n'ait guère plus de vingt-quatre ans. Trois
promotions en trois mois, voilà d'abord ce que lui vaut ce siège.
Mais les promotions sont rapides à cette époque, et Toulon lui donne
bien davantage : le sentiment de sa force, on peut presque dire de son
génie. Tous ceux qui l'ont approché, civils et militaires, les
représentants de la Convention, ses subordonnés et ses chefs, subissent
plus ou moins son prestige. ... Le siège de Toulon a fixé une fois pour
toutes son état d'esprit, ses idées, sa doctrine là-dessus. " (L'aurore
de Napoléon / Raymond Recouly - 1929). " Rien n'a été changé dans l'aspect et les abords du château. Une allée de superbes cyprès, comme on n'en voit qu'en Italie, conduit de l'entrée principale à la terrasse. L'élégance des portails et des grilles, une magnifique volière, l'importance des communs dénotent une demeure qui dut être fastueuse. " En 2017, il ne reste que les troncs coupés de ces cyprés (à droite). Une visite lors des Journées du patrimoine à ne pas manquer (sur inscription). Continuez cette histoire : Les forts de la Rade de Toulon. |
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