Mais
où sont donc les Sarrasins de La Garde Freinet ?
" « Frères, s'écria-t-il, en se tournant vers sa troupe, il est temps
de combattre pour le salut de nos âmes ! » et il fondit sur
l'ennemi. La mêlée fut sanglante, mais la victoire indécise. Si nous en
croyons la légende, ce fut saint Buvons (ou Bavon) qui, par un coup de
main hardi, décida de la ruine des Sarrasins. Gibelin les avait chassés
de la plaine, mais ils tenaient encore dans les montagnes du Fraxinet,
où l'on ne pouvait les forcer. Buvons accepta la périlleuse mission.
... "
(Le littoral de la France - Vattier d'Ambroyse, Valentine - Edition :
1883-1889). Sauf que ... |
Qui ne connait pas de tour sarrasine dans le Var ? Parce qu'à La Grade-Freinet : " Plusieurs campagnes de fouilles permirent finalement de mettre au jour les vestiges du village médiéval jusque-là oublié, sans découvrir la moindre trace d’une occupation du site par les Sarrasins." (http://www.conservatoiredufreinet.org). Déception ! Sûrement pas, tellement les références historiques sont nombreuses et que les récits de batailles entretiennent si bien le salut de l'Histoire : " Rotbold (un des seigneurs chrétiens) dirigea la première attaque ; l'un des chefs des Sarrasins, Aymon, les avait trahis et lui servait de guide. Il pénétra dans le Freinet et se trouva bientôt en face des pirates. " ... A la visite ! |
En 1787, " LA GARDE-FREYNET, anciennement La Gardo-Freynet,
& la Gouardio, est une communauté du diocèse de Fréjus et de la
viguerie de Draguignan, qui comprend deux paroisses et une succursale.
Elle est située à 6 lieues de Fréjus, ... à 9 de Toulon. Ce lieu était
connu sous le nom de Vallis Fraxineti. Le village de la Garde est bâti
à peu de distance du lieu où était le fort de Fraxinet, qui avait pris
son nom de la quantité de Frênes qu'il y avait sur la montagne : le
peuple nomme ces arbres 'Fraiffes'. Ce n'était probablement qu'un vaste désert, dans le temps que les Sarrasins y élevèrent cette fameuse forteresse à laquelle on abordait par des espèces de marches taillées dans le roc. On ne voit de nos jours que des vestiges bien faibles de cette forteresse ; il y a un réservoir taillé dans le roc, que l'on croit été une citerne. " (Claude-François Achard - Description historique, géographique et topographique des villes, bourgs, villages et hameaux de la Provence ancienne et moderne - 1787). |
1787 : " Le territoire est situé dans un pays de pays
montagneux : le sol en est léger & sablonneux. On y recueille du
blé, de l'huile, mais peu de vin. La principale récolte est celle des
marrons, qui sont plus gros et plus renommés que partout ailleurs. Les
forêts abondent en pins pour la construction, et en liège. Elles
produisent immensément, sans les incendies fréquents que l'on attribue
aux bergers. Il y a dans ce pays 7 à 8 fabriques de bouchons qui
occupent plus de 50 personnes. L'on trouve dans les bois, des chevreuils, que l'on nomme vulgairement Cabolos, des sangliers, des loups, des renards, des fouines, etc. Les gibier est abondant et l'on en porte à Toulon et à Marseille. On trouve encore dans le territoire de la Garde des mines de plomb et d'argent, qui ne sont point exploitées par la dépense qu'elles occasionneraient. " |
Un site impressionnant situé à 450 m d’altitude. Le chemin
d'accès en bas à gauche ; remarquez également le fossé rempli d'eau.
Occupé à la fin du XIIe siècle le site fut abandonné un siècle plus
tard au profit du col de la Garde bien plus accessible, proche des
terres cultivables et des sources d'eau. " En 1589, lors des guerres de
religion, le Maréchal de La Valette, Duc d’Epernon, Gouverneur de
Provence ordonna sa destruction préventive et définitive. " (panneau
explicatif sur le site). |
J'ai retenu cet article du Docteur
Marmottans
paru dans
le bulletin de l'Académie du Var en 1995 pour guider notre
visite : " L'établissement d'une communauté de Sarrasins au cœur des Maures, réalité qui fit trembler nos lointains ancêtres du Xe siècle durant plus de quatre-vingts ans, demeure une des passionnantes questions de notre histoire ancienne et un sujet de réflexion d'une brûlante actualité. Le Fraxinet était-il un repaire de pirates, une tête de pont musulmane en Gaule méridionale, une tentative camouflée de colonisation islamique ? On peut en discuter. Mais ce fait incroyable, dont ne subsiste aucun vestige archéologique certain et dont les écrits contemporains sont en nombre infime, eut des conséquences historiques et culturelles extrêmement importantes. Tous ces problèmes ont été récemment mis au point par des historiens comme Jean-Pierre Poly ou Philippe Sénac auxquels je ferai de larges emprunts. " Le Docteur Tony Marmottans était docteur en Médecine, ancien anesthésiste réanimateur des hôpitaux. Décédé en 2016, Hubert Falco lui rendit hommage en ces termes : " Avec lui, Toulon perd l’un de ses plus beaux esprits. Amoureux de Toulon, il a publié de très nombreux ouvrages sur la grande et la petite histoire de notre ville, alliant avec bonheur une grande rigueur dans la recherche de la vérité historique et le goût de l’anecdote. Il n’avait pas son pareil pour vous guider avec passion, par ses écrits et ses conférences, dans le Toulon d’autrefois. Membre titulaire de l’Académie du Var dont il a été à deux reprises le président, vice-président de la Société des Amis du Vieux Toulon, Tony Marmottans était un passeur : il aimait faire partager ses connaissances, il aimait transmettre. " |
" La Croix ; 6 mètres de haut, elle fut consacrée le 3 mai
1900, jour de la sainte Croix et de Saint Clément, patron du village.
On raconte que son commanditaire l’abbé Mathieu l’aurait placée exprès
dans l’axe de la place Neuve. Il répondait ainsi au climat anticlérical
de l’époque, et visait plus particulièrement le propriétaire athée de
la plus imposante maison du village… L’ancien Office de Tourisme ! La
tradition affirme que le clerc aurait lancé à son ennemi : “ Jusqu’à la
fin de tes jours tu auras le Christ en face de toi ! ”. |
Le monument
avait également une fonction moins spirituelle : il servit de
paratonnerre au village pendant des années, avant que la rouille n’en
vienne à bout. Très endommagée, la Croix a été restaurée en 1978. "
(https://la-garde-freinet-tourisme.fr). |
1787 - " Les habitants du Fraxinet bâtirent le village de La
Garde
vers l'an 1394 : on conserve une transaction entre le seigneur de ce
temps et les habitants , par laquelle " il leur permet de prendre du
liège dans ses bois pour couvrir leurs maisons." ... Le climat du
Frainet est vif, froid et sain. Le vent du
Nord y est si violent, qu'on est obligé de faire des maisons fort
basses, & de mettre sur les toits de grandes pierres plates pour
retenir les tuiles. En 1777, le vent emporta un homme à vingt pas de
distance, & le fracassa tellement, qu'il mourut peu de temps après.
Les maladies les plus ordinaires sont la Phthisie, les rhumatismes
& la pleurésie. Le caractère des habitants du village est différent de celui des gens de la campagne. Ceux-ci sont Religieux, simples, droits et charitables. Ils travaillent beaucoup, et il en est plusieurs fort riches qui ne font pas étalage de leurs biens par le luxe, mais par les aumônes. On compte jusqu'à vingt différents hameaux dans cette paroisse, dont quelques uns sont composés de 15 à 20 familles. " (C-F Achard - Description historique ... de la Provence ... - 1787). |
" Ce n'était probablement qu'un vaste désert, dans le
temps que les Sarrasins y élevèrent cette fameuse forteresse à laquelle
on abordait par des espèces de marches taillées dans le roc. " (C-F
Achard - Description historique ... de la Provence ...
-
1787). " Les temps forts du premier acte des invasions musulmanes en Occident chrétien après la conquête de l'Espagne, sont la prise de Narbonne en 720 et la fantastique chevauchée des Arabes vers la Touraine stoppée par Charles Martel près de Poitiers. Ce premier acte s'acheva sous les coups de boutoir des Carolingiens qui, l'an 737, les chassèrent d'Avignon où les avait appelés Mauronte, duc de Provence, pour faire échec aux Francs, et par la reconquête de la Septimanie en 759. " (Les Sarrasins du Fraxinet - par le Docteur Marmottans - 1995). |
" On considère cette première phase de l'invasion arabe en
Gaule comme une expression du djihad islamique où la motivation
religieuse primait en principe l'attrait du pillage. Au IXe siècle,
l'invasion va procéder autrement. Il ne s'agit plus de soldats mais de
pirates. On ne parle plus d'Arabes mais de Sarrasins, terme générique à
l'étymologie obscure, groupant des chefs arabes, des Berbères, des
renégats chrétiens, des Andalous, des Majorquins et des aventuriers de
toute espèce. La razzia des campagnes, des villes mal défendues ou des
monastères, la capture de prisonniers revendus comme esclaves ou
rançonnés à prix d'or deviennent les véritables objectifs de raids qui
sont des incursions maritimes semant la désolation sur nos côtes
languedociennes et provençales. Ces raids, souvent empreints d'une grande hardiesse et d'une grande férocité, relayés après l'an mil par les descentes barbaresques, ont été singulièrement majorées dans la mémoire collective de nos ancêtres et les écrits des historiens d'autrefois, même si, de nos jours, on observe une bémolisation peut-être excessive à son tour. ln médio stat virtus ! " |
Le castrum s’organise en deux parties : en jaune sur le plan
et au sommet : le secteur du château ; en saumon sur le plan : le
village sur la pente nord et ouest séparé du château par une rue (en
vert). " L'histoire de nos villages, la tradition orale, la toponymie de certains lieux, la légende se sont emparées des Sarrasins pour en faire l'épouvantail de toute cette période obscure du haut Moyen Age particulièrement calamiteuse pour les populations. L'image du Sarrasin va d'ailleurs se transformer au cours des siècles. D'abord être bien réel de cauchemar, tueur, pilleur et violeur, il deviendra croquemitaine, dispensateur d'orientalisme, inspirateur non seulement de chansons de geste mais plus tard d'œuvres littéraires, comme nous l'a exposé M. Albert Giraud dans une communication à l'Académie du Var. Le Sarrasin, l'homme noir, le babaou, le diable, va se retrouver intimement lié à notre folklore, à nos bravades et jusqu'à cette sarrasinade des années 1950, rappelant par de grandes fêtes leur débarquement lointain dans le golfe de Saint-Tropez ! " |
" Ce fait remarquable, que l'on situe entre 880 et 890,
n'était pourtant pas le premier du genre en Provence. Trente ans
auparavant, les Sarrasins avaient établi une base plus ou moins
permanente en Camargue, à partir de laquelle ils effectuèrent de
multiples raids dans la région arlésienne, allant jusqu'à se saisir de
l'archevêque d'Arles qu'ils rançonnèrent pour finalement le rendre mort
! A la fin du IXe siècle, c'est la Provence orientale qui va connaître
une implantation sarrasine durable et, semble-t-il, à la faveur du
hasard. Si l'on en croit l'évêque de Crémone, Luitprand, un des meilleurs historiens contemporains de ces événements, une felouque maure montée par une vingtaine d'hommes essuya une violente tempête au large de nos côtes et vint s'abriter dans le golfe de Saint-Tropez, connu des géographes de l'antiquité sous le nom de Sinus Sambracitanus. Les hommes débarquent dans un lieu que nous ignorons, s'emparent d'un hameau voisin et massacrent les habitants pour s'installer à leur place. Ces aventuriers, qui ne sont probablement pas des novices, explorent la région et découvrent rapidement les avantages qu'elle pourrait présenter pour servir de repaire mouillage abrité, défense naturelle du site par de hauts sommets couverts de forêts impénétrables, abondance d'eau douce, faible densité de la population indigène. Les uns demeurent sur place, les autres regagnent la côte andalouse pour chercher des renforts et c'est ainsi que va s'établir autour du golfe sambracitain une communauté musulmane se renouvelant assez souvent, n'excédant pas quelques centaines d'hommes et plus ou moins rattachée au califat de Cordoue." |
" Il convient de mieux étudier les lieux. Le golfe
sambracitain, véritable fjord s'avançant à l'intérieur des terres et
ménageant au sud la presqu'île de Saint-Tropez, avait au Xe siècle une
configuration différente de celle que nous lui connaissons. La mer,
basse et marécageuse, couvrait une partie des terres alluviales
aujourd'hui émergées et venait jusqu'au pied des hauteurs de Grimaud et
de Cogolin. La Giscle débitait alors beaucoup plus d'eau que de nos
jours. Les auteurs médiévaux, ont donné à ce territoire le nom de Fraxinet, du latin fraxinetum, bois de frênes, et les historiens l'ont repris sans lui donner toujours la même signification. Il s'agit soit de toute une région mal délimitée, soit d'un village (le plus souvent La Garde-Freinet), soit d'une forteresse. Le Fraxinet correspondait en fait à toute la partie côtière et montagneuse des Maures comprise en arc de cercle de Cavalaire à Sainte-Maxime et débouchant au nord sur la plaine de l'Argens. Cette zone hostile et difficilement accessible abritait une population très restreinte, avec des lieux d'habitat mal identifiables car ils ont souvent changé de nom et d'emplacement. Les chartes établies une cinquantaine d'années après le départ des Sarrasins, mentionnent des sites comme Cuculinus, c'est-à-dire Cogolin, Sancti Torpetis pour Saint-Tropez, Grimald pour Grimaud, Ramatuella dont le nom serait une réminiscence arabe rahmatu ilah, le bienfait de Dieu, peut-être Gassin qui serait Gualdixart. |
Le four, ce sont
les pierres rougies par le feu qui laissent supposer l'utilisation
de cette construction.
" Cette population autochtone vivait pauvrement de la terre, de la pêche et de la forêt. Il est possible que les musulmans venus de la fertile Andalousie leur aient enseigné de nouvelles pratiques agricoles, comme la culture du blé noir, apporté de nouvelles races d'animaux d'élevage, appris l'extraction de minerais et l'exploitation du bois à des fins de construction navale. Le goudron tiré de la résine, katran en arabe, se retrouve en provençal sous le nom de quitran. On pense qu'il y eut une certaine symbiose entre les deux communautés et que les Provençaux de l'enclave du Fraxinet acceptèrent avec une certaine passivité la domination musulmane, pas plus pénible que celle des Francs. Il faut ajouter aux sources manuscrites occidentales mentionnant le Fraxinet des textes arabes, le plus souvent issus de géographes, qui nous permettent d'en apprendre davantage. Le Fraxinet devient le Djabal-al-Kilal (la montagne des sommets), dépendance du califat de Cordoue. Ces textes arabes, au nombre de cinq ou six, ont été traduits et étudiés ces dernières décennies par Philippe Sénac, auteur de plusieurs ouvrages sur les Sarrasins du Fraxinet. " |
A droite : une
cave et pas une citerne comme l'eau pourrait le laisser croire.
" Comme nous l'avons dit, aucune fouille sérieuse entreprise sur les lieux présumés de l'occupation musulmane ne s'est révélée parlante. Ni sur le littoral, ni sur les hauteurs de Notre-Dame de Miremer ou du fort Freinet, considéré traditionnellement comme la principale forteresse des Sarrasins. Le magnifique socle rocheux qui domine La Garde-Freinet porte à son sommet des ruines qui sont en fait celles d'un château et d'un village très postérieurs au dixième siècle. Cela ne veut pas dire qu'il n'y ait eu d'abord une occupation sarrasine, mais elle n'a laissé aucune trace. On met aujourd'hui ses espoirs dans l'archéologie sous-marine qui a permis déjà de relever plusieurs épaves sarrasines, mais assez éloignées du Fraxinet proprement dit. " |
Les
habitations du village sur la pente orientée nord et ouest.
" Les Sarrasins du Fraxinet n'avaient certainement pas pour mission de bâtir, hormis quelques ouvrages défensifs aujourd'hui disparus. Ces hommes installés sommairement attendaient sans doute avec impatience de partir en expéditions guerrières fructueuses ou de rentrer al-Andalus avec leur butin et leurs prisonniers destinés aux marchés d'esclaves de Valence et de Tortose. Le Djabal al Kilal était avant tout une base militaire d'aventuriers ou plutôt de pirates qui exercèrent leurs ravages en Provence et dans les Alpes. Leur succès est dû non seulement à leur audace et à leur mobilité, mais aussi à l'anarchie politique qui régnait alors en Provence, aux luttes entre seigneurs qui n'hésitaient pas à les enrôler pour triompher de leurs rivaux, à l'irresponsabilité des gens d'église, à la passivité des populations livrées à elles-mêmes et à la maîtrise de la mer exercée par les musulmans. " |
" Après s'être solidement installés dans le massif des
Maures, les Sarrasins vont entreprendre des razzias de plus en plus
éloignées de leur base. C'est d'abord la zone littorale qui subit leurs
dévastations. Fréjus, Antibes, Toulon, Marseille, puis la vallée de la
Durance, Manosque, Sisteron, Embrun pour ne citer que les villes. Les
cols et les vallées alpines attirent leurs convoitises. Ils pillent les
convois ou prélèvent de lourds tributs au passage, aidés en cela par
des bandes de brigands appelés « marrons », rançonnent les voyageurs,
rackettent les communautés rurales, établissent des lieux fortifiés
dans la vallée de l'Arc. L'abbaye de Novalaise en Piémont, dans le Val
de Suse, est dévastée en 906, celle de Saint Gall, dans le nord de la
Suisse, en 939. " |
" Ces pillages, cette entrave aux communications, cette
insulte à la chrétienté amenèrent bien évidemment des réactions pour
les déloger de leur repaire et les exterminer. En 931, une tentative
maritime contre le Djabal al Kilal est engagée par une flotte grecque.
Sans succès. En 942, le roi d'Italie et comte de Provence Hugues tente
à son tour une opération terrestre contre le Fraxinet, appuyée par des
navires byzantins qui s'efforcent d'incendier la flottille musulmane du
golfe sambracitain à l'aide du feu grégeois. Hugues et ses soldats
s'avancent dans le cœur des Maures, mais la menace d'un concurrent en
Italie lui fait rebrousser chemin. Mieux encore, il traite avec les
Sarrasins et leur garantit l'occupation des cols alpins pour défendre
ses frontières... " |
" En 950, une tentative diplomatique entre l'empereur
d'Allemagne, Othon le Grand, et le calife de Cordoue, pour mettre fin à
la piraterie des Sarrasins du Fraxinet échoue à son tour. Il faut
attendre 972 pour voir enfin se décider l'assaut du Fraxinet. Cette
décision, prise par le nouveau comte de Provence, Guillaume, qui sera
surnommé Le Libérateur, son frère Rotbold, les principaux barons dans
leur mouvance, le moine Beuvons et la flotte grecque, eut lieu après la
capture dans le Valais par les Sarrasins du prieur de Cluny, Mayeul, un
homme très influent de son temps. La rançon demandée pour sa libération
fut rapidement versée mais les troupes provençales se mirent en marche
sur le Fraxinet, chassant devant eux tous les Sarrasins qu'ils
rencontraient. Une bataille décisive se déroula suivant la tradition à
Tourtour. Refoulés dans leur repaire, bloqués par les navires grecs,
les Sarrasins n'eurent d'autre ressource que de tenter de s'embarquer,
de s'éparpiller dans la nature, de périr les armes à la main ou de se
laisser capturer pour devenir à leur tour des esclaves. Il y en eut
longtemps en Provence. " |
Un fossé en eau à cette altitude ! Taillé dans la roche,
défensif et réserve d'eau, il était alimenté par la canalisation des
eaux de ruissellement. " L'extermination des Sarrasins du Fraxinet eut pour conséquence, après un siècle d'insécurité et de dévastations, l'installation d'un régime féodal durable. Guillaume donna les terres reconquises à ses frères d'armes et à l'Eglise. Les Sarrasins disparurent de notre horizon, mais on les revit longtemps encore se livrer à de terribles incursions maritimes sur nos côtes, sans toutefois s'établir chez nous. " |
" L'histoire surprenante de ce bastion musulman en Provence
au Xe siècle, encore si mal connue aujourd'hui, nous amène à nous
demander quelle était sa véritable signification, en supposant que son
implantation n'ait pas été tout à fait due au hasard. Pouvons-nous
considérer le Fraxinet comme une marche du califat de Cordoue sur un
axe Andalousie - Baléares - massif des Maures? Le Fraxinet était-il
seulement un repaire de pirates agissant pour leur propre compte ou,
comme le suggérait récemment Philippe Sénac, une tête de pont omeyyade
ayant pour but en dehors des ses actes de pillage, de contrôler le
commerce maritime en Méditerranée orientale entre l'Italie et
l'Espagne? Son importance stratégique n'échappera à personne et son
existence, déformée par la légende, pose de nombreux problèmes non
encore résolus. " Ou presque ... Un bel article. |
Le Kiosque (1872) était auparavant une halle aux poissons. |
L’église Saint-Clément et son clocher tour. L’église
paroissiale est dédiée à saint Clément, saint patron de la commune. Il
s’agit probablement de l’emplacement de l’église médiévale. Elle fut
entièrement reconstruite de 1782 à 1787 pour répondre à l’accroissement
de la population. Le clocher a été bâti en 1571. Il mesurait alors
environ 6,5 m de hauteur. La tour fut surélevée en 1698 pour y placer
une horloge. En 1785, lors de la reconstruction de l’église
paroissiale, un nouveau campanile fut installé pour remplacer l’ancien
devenu trop petit. |
1787 : " Les fêtes du lieu sont : 1. celle du St Patron, le
23 novembre. Celle de la translation de ses reliques, le 3 mai, jur de
la bravade. Un usage singulier est celui qui s'observe le jour de la Fête-Dieu. Les Marguilliers & Marguillières de la confrérie du St Sacrement (personnes chargées d'administrer les biens de la paroisse) s'assemblent le matin, ayant chacun un cierge avec l'écusson de leur confrérie qu'ils ne quittent qu'au moment qu'ils se séparent après le bal qui dure bien avant la nuit, & qu'on commence d'observer que les torches de la confrérie servent à éclairer pendant le bal. Un usage, pour le moins aussi ancien, vient d'être aboli depuis peu. C'était une cérémonie du premier jour de l'année. Les jeunes gens venaient à la paroisse présenter les uns des grives, les autres des bécasses, des perdreaux, etc. Le prieur-curé recevait ainsi de bonnes étrennes ; mais il a supprimé cette cérémonie, parce que ceux qui faisaient cette offrande, prétendaient que le prieur, en l'acceptant, leur donnait la permission de danser pendant tout le temps du carnaval. " (C-F Achar - Description historique ... de la Provence ancienne et moderne - 1787). |
La Fontaine Vieille. " En 1812, le maire Joseph-Jacques Amic, fit restaurer la fontaine, qui fut longtemps la seule du village. Le nouveau mur-fontaine monumental comporte trois bassins alimentés par des mascarons anthropomorphes. La surverse alimentait une petite auge en grès. Ses dimensions soulignent l’importance des points d’eau à une époque où elle n’arrivait pas dans les foyers. Son utilisation par les habitants était d’ailleurs strictement réglementée et les amendes encourues dissuasives. Il était par exemple interdit d’être trop nombreux en même temps, pour ne pas faire baisser brusquement le niveau des bassins. Les légumes devaient être débarrassés de la terre et des racines pour ne pas troubler l’eau. En aucun cas, il n’était permis d’y laver de la viande, excepté au temps des agneaux et chevreaux où on pouvait laver les tripes, mais en faisant couler l’eau en dehors du bassin. Il était également prohibé de plonger dans les bassins de trop grands récipients (chaudrons, cornues, etc.), excepté en cas de feu. Enfin, dans notre région où l’aigo es d’or, l’accès même à la fontaine publique pouvait être restreint, lors des « basses eaux ». " |
Le Lavoir.
" Toute la journée, le bruit des battoirs des
laveuses se mêle au bouillonnement de l'eau courante ... Ce qui ne
signifie pas que les rues de La Garde-Freinet soient, précisément,
irréprochables : le mistral n'y accomplit pas une tâche superflue ! "
(Le littoral de la France - Valentine Vattier d'Ambroyse - 1889)Il est alimenté par la même source que la fontaine Vieille. Sa réfection, en 1812, correspond au développement des lavoirs au XIXe siècle, répondant à l’augmentation de la population et à la prise de conscience des besoins d’hygiène et de salubrité. Les lavoirs servaient à laver le petit linge, utilisant les plans inclinés pour le savonnage et le brossage. Il fallait bien-sûr respecter l’ordre des bassins, celui du haut étant réservé au rinçage tandis que le savonnage s’effectuait dans les deux autres. |
Puits dans le village. |
Direction le moulin de Blanche ... |
... en passant par le très joli rucher de Blay ... |
... et arriver au moulin de Blanche, à découvrir sur cette page spéciale. |
La
chapelle Saint-Clément.
" De cette commune partent chaque année deux
processions
pour des chapelles champêtres. La première se fait dans l'après-midi du
jour de Saint-Clément, patron du pays. La procession, tambours et
musique en tête et accompagnée par une bruyante bravade, va baiser
respectueusement les reliques du Saint après que les porteurs d'armes
lui ont, par de nombreuses décharges, rendu ce qu'ils appellent les
honneurs militaires. La seconde procession gravit, le deuxième dimanche
de septembre, une montagne au sommet de laquelle se trouve la chapelle
de Notre-Dame de Mire-Mar, dans laquelle on voit une statue de la
Sainte-Vierge très vénérée dans le canton. " (Bulletin de l'Academie du
Var, 1849). |
" Saint Clément de Rome, Saint patron de la Garde-Freinet
martyr pape en l'an 96 " |
Saint Clément, troisième successeur
de St Pierre, pape vers 91-100 et martyr du 1er
siècle, il est le patron de la paroisse, célébré chaque année début mai
pour commémorer la translation des reliques du saint à l’église de La
Garde-Freinet. La chapelle actuelle a probablement été rebâtie au XVIIe siècle. Mais, d'après les rares textes et les recherches archéologiques effectuées aux environs, elle pourrait être une fondation privée attachée à un grand domaine agricole de l'Antiquité tardive. Elle a servi de paroisse jusqu'à la construction de l'église dans le village actuel, au XIIe ou XIIIe siècle. |
L'œuvre de Mario di Teana. Le 13 mai 1967, l'évêque de
Fréjus et le préfet du Var inaugurèrent la chapelle qui venaient d'être
entièrement restaurée. 5 ans plus tôt, la maire, Alferd Max, avec le
soutien de l'abbé Espitalier, curé de la paroisse, avaient lancé un
projet de réfection et sollicitait l'artiste italien Mario di Teana qui
réalisa une œuvre originale, empreinte de multiples influences, dans
laquelle la lumière et la composition forment le trait d'union entre le
symbole et son expression, selon la description qu'en a faite l'artiste. Les murs latéraux et la façade sont percées de quatorze croix de verre qui représentent les stations du chemin de croix. Leur disposition indique le cheminement du Christ sur le Golgotha ; tombant, s'arrêtant, se relevant, marchant inexorablement jusqu'au moment où, immobile et verticale, la croix annonce la fin du supplice. |
Dans le fond du cœur, une grande croix en verre s'inscrit
dans le triangle symbolique de la Trinité. Les différentes couleurs de
verre révèlent l'intensité de l'émotion et du drame dans les scènes la
Passion. C'est par ces croix en dalle de verra faisant office de
vitraux qu'est assuré l'éclairage de la chapelle : le soleil répand à
l'intérieur des nappes de clarté différemment colorées rendant l'air
palpable et visible. |
La
chapelle Notre-Dame de Miremer - " qui regarde la mer ".
Autrefois Miravaux, Miravals, Miramar ...
aujourd'hui Miremer. La colline de Miremer culmine à 403 mètres
d'altitude à mi-chemin entre la Grade-Freinet et Grimaud. |
Au sommet, sur un vaste plateau, se dresse la chapelle de
Notre-Dame de Miremer, offrant un magnifique panorama sur le golfe de
Saint-Tropez. La chapelle est mentionnée pour la première fois au XIIe
siècle et accueille un pèlerinage chaque 8 septembre, jour de la
Nativité de la Vierge. |
Un ancien village médiéval
Cette position stratégique et la proximité de
bons
terroirs au pied de la colline en fit un lieu propice à l'établissement
d'un habitat au Moyen-âge : le castrum Miravaux. Il n'en reste
aujourd'hui que quelques vestiges masqués sous le maquis. |
« .... La position du Freinet permet d'apprécier les
difficultés et les dangers de l'entreprise. Aussi Buvons, dit son
biographe, promit-il à Dieu de renoncer à la profession des armés, de
faire le pèlerinage de Rome et de finir ses jours dans un cloître, si
le succès couronnait ses efforts. Guidé par les gens du pays, il
s'établit sur le sommet de Pigros et s'y retrancha. Ce plateau qui, de
la plaine, n'est accessible que du côté de l'est, se rattache, au midi,
par une crête étroite à Pey-Marie, et de là à La Garde, dont il n'est
distant que d'une demi-lieue. Les Sarrasins n'y voyant qu'une poignée de gens, les méprisèrent et négligèrent de leur opposer des forces considérables. Buvons les harcelait, mais inutilement, lorsque la trahison de l'un des hommes préposés à la garde du fort lui vint en aide. Guidé par lui, il se glissa la nuit avec sa troupe jusqu'au pied du fort, en surprit la garnison et s'en empara. » Voilà, " la poésie tout autant que l'histoire s'en est emparé, comme il est facile de le comprendre. Le résultat suffisait. " |
" Que va-t-on chercher hors de la France ? Demanderons-nous encore et toujours. Souvenirs historiques, ruines pittoresques, végétation admirable, climat excellent, surprises panoramiques enchanteresses, le pays des Maures offre : tout cela ... " (Le littoral de la France - Valentine Vattier d'Ambroyse - 1889). |
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